Isabelle Munoz, d’adulte-relais à médiatrice scolaire pour la commune d’Anzin

Mis à jour le 03/05/2019

Madame Isabelle Munoz a bénéficié d’une convention adulte-relais pendant 6 ans, avant d’être recrutée comme médiatrice scolaire par la commune d’Anzin en CDD.

En raison de son parcours exemplaire, elle a été mise à l’honneur en tant qu’adulte-relais par Monsieur le Préfet de région, Michel Lalande, à l’occasion de la cérémonie des Prodiges de la République en 2017.

Elle est aujourd’hui dans la perspective d’être titularisée. Elle démontre ainsi que ce dispositif de contrat aidé fonctionne.

Le dispositif adulte-relais permet en effet à une structure, association ou collectivité territoriale, d’embaucher un médiateur grâce à un financement du poste par l’État à hauteur de 95 % du SMIC brut. Créé en 1999, il vise à concourir au maintien du lien social, renforcer la vie associative de proximité et développer la capacité d’initiative dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV). En tant que contrat aidé, il poursuit également l’objectif de favoriser le retour à l’emploi du public cible : des personnes de plus de 30 ans, sans emploi et résidant en QPV. Une fois engagées, durant leur contrat, ces personnes doivent pouvoir suivre une formation diplômante dans le champ de la médiation sociale ou dans d’autres secteurs. Tout doit être fait pour leur permettre de construire ou consolider leur parcours professionnel.

Isabelle, pouvez-vous présenter votre parcours ?

J’ai démarré en tant que bénévole pour la maison de quartier de Raismes, puis poursuivi en qualité d’animatrice ce qui m’a permis de passer le BPJEPS (brevet professionnel de la jeunesse, de l'éducation populaire et du sport). J’ai toujours aimé accompagner les plus jeunes. Malheureusement, ce contrat s’est arrêté. J’ai alors bénéficié d’une convention adulte-relais en tant que médiatrice sociale pendant trois ans pour la ville de Petite-Forêt, où j’étais en charge de la gestion des conflits et notamment ceux de voisinage. Je me suis ensuite consacrée à ma vie de famille, j’ai donc globalement entamé tardivement mon cursus professionnel. Par la suite, j’ai travaillé pour la ville d’Anzin à destination des 16-25 ans. Je souhaitais par ce biais passer mon DEJEPS (diplôme d’État de la jeunesse, de l’éducation populaire et du sport).

C’est comme cela que j’ai eu connaissance d’un poste de médiatrice scolaire proposé par la ville. Aujourd’hui, je travaille donc pour la commune d’Anzin, sur ce poste, et pour un public plus jeune.

Pouvez-vous nous décrire, selon vous, ce qu’est la médiation scolaire ?

La mission est vaste et très enrichissante et permet de travailler sur plusieurs axes.

On me transmet toutes les absences au sein des écoles et les inquiétudes. Ma particularité est d’aller au domicile et de créer ou re-créer le lien école-famille, là où il y a nécessité d’établir un contact avec les familles éloignées.

Tout le travail repose sur ce lien de confiance, et aller au domicile facilite en ce sens le travail, car l’utilisation du téléphone ne fonctionne pas. Les familles ne répondent pas par ce biais…J’essaie donc de créer ce lien pour donner l’envie, mais également pour rappeler la loi et les obligations scolaires. C’est une particularité de ce poste, j’interviens bien en amont de toutes décisions judiciaires. On essaye de voir ce qu’il se passe, de travailler ensemble.

Mes missions contiennent également un axe médiation entre l’enfant et l’école, entre les familles et l’école. C’est-à-dire que beaucoup d’inquiétudes pèsent. Les enfants ont parfois des phobies, des peurs, des difficultés. Il y a donc un lien permanent avec les services de l’Éducation Nationale.

Il s’agit de voir ce qui est possible, de créer des écoutes face aux ressentis, à l’avis de l’institution, à ce qui vit l’enfant qui ne va pas bien en interne, ou au parent qui n’est pas rassuré.

Si je devais résumer, je dirais que nous favorisons la communication, le dialogue.

À quels besoins, selon vous, répond la médiation scolaire ?

Au fait qu’il est difficile voire impossible de joindre les familles. Je me positionne donc comme une personne ressource pour les écoles afin de toucher les familles les plus éloignées. Cela donne la possibilité d’avoir des échanges école-famille et surtout de les provoquer.

Quel a été votre rôle dans la lutte contre l’évitement scolaire ?

Faire en sorte que les enfants ne prennent pas l’habitude de ne pas aller à l’école. Mon rôle est préventif. J’alerte, je conseille, j’oriente, je questionne, j’accompagne.

Sur quels outils vous appuyez-vous ?

Mes outils sont divers. Il peut s’agir du CLAS (Contrat Local d’Accompagnement Scolaire), que j’utilise pour que l’enfant ne perde pas pied, pour les accompagner, sa famille et lui. Je m’appuie également sur le PRE (Programme de Réussite Éducative), sur les services sociaux lorsque cela le nécessite. À ce sujet, le partenariat que nous avons développé est aujourd’hui très intéressant. Nous avons appris à travailler ensemble, et je pense également avoir réussi à démystifier l’image des travailleurs sociaux. Ainsi, les familles les perçoivent comme ressources. Ce travail de médiation est en ce sens primordial. Via le lien de confiance établi avec les familles, il me permet de faire face à leurs idées reçues et de faciliter le lien avec les institutions.

Quelles ont été vos principales difficultés ?

Asseoir ma légitimité pour que les portes s’ouvrent. Cela peut prendre du temps et certaines portes peuvent malheureusement rester fermées.

J’ai également pu constater, s’agissant des enfants, de grosses problématiques relatives aux écrans, d’énormes carences en termes de communication. Je constate qu’ils ne savent pas s’écouter et ne savent pas se parler, et les parents ne s’en rendent pas compte. Toute la difficulté est de soulever la problématique, que les familles en prennent conscience et de réussir à les amener vers des outils leur permettant d’exercer leur parentalité.

Quelles ont été vos satisfactions ?

De voir les enfants avoir de nouveau l’envie d’aller à l’école et les parents prendre conscience que l’école est importante, que les problématiques sont soutenues et accompagnées, qu’ils ne se sentent pas seuls.

Ma réussite, je la perçois également au travers de la mise en place de « cafés des parents », leur développement, le lien que cela implique entre l’école et les familles. J’ai permis ce rapprochement et facilité le lien. J’ai créé la rencontre.

Le café des parents se déroulent dans 7 écoles et mobilisent les parents 1 fois par mois pour environ 12 à 15 parents.

Aussi, à chaque fin d’année, les enfants repérés comme fragiles sont accompagnés pour réaliser un spectacle qui permet de donner une autre image, qui valorise l’enfant et qui associe à la fois les parents et l’école. Ce travail est également gratifiant.

Où en êtes-vous aujourd’hui dans votre parcours de formation ?

J’ai pu finaliser mon DEJEPS, ce qui m’a permis de monter en compétence. Grace à cela, mes missions sont aujourd’hui plus larges notamment en matière de coordination de projets.

Que vous a apporté cette mission d’adulte-relais ?

La confiance, l’épanouissement personnel et professionnel et puis l’apprentissage du travail avec les autres.

Vous avez bénéficié d’une convention de 6 ans en tant qu’adulte-relais. Quelle est votre situation actuellement ?

Ma mission est plus large. Je me suis formée selon les besoins et notamment dans l’accompagnement à la parentalité. Ces formations me permettent aujourd’hui d’accompagner au mieux les familles en attendant les relais possibles sur les situations difficiles.

Je suis toujours médiatrice scolaire, avec une montée en compétence sur le volet « accompagnement à la parentalité ». Je travaille dorénavant davantage sur la gestion des émotions, sur la communication non-violente. Mon ambition est de proposer tout un ensemble d’outils dont les parents puissent se servir en faveur de l’éducation de leurs enfants.

Quelles sont vos perspectives au sein de cette collectivité ?

En novembre 2019, je serai stagiaire de la fonction publique territoriale avec l’objectif d’être titularisée dans la foulée. Le poste de médiatrice scolaire devrait être créé.

Comment expliquez-vous cette volonté de pérenniser votre mission ?

Les parents ont besoin de personnes ressources qui peuvent accompagner, orienter, relayer dans la scolarité de leur enfant. Le besoin est plus-que présent.